Pluto, tome 8 de Naoki Urasawa

Publié le par Louis

 

A la lecture du premier tome de "Pluto", Naoki Urasawa donnait l'impression, notamment au travers du personnage de Gesicht, que l'univers d'Astro n'était qu'un "emprunt" à Osamu Tezuka et qu'il allait complètement redéfinir l'approche du personnage. Cette impression était renforcée par le fait que le célèbre robot ne semblait être qu'un simple protagoniste de l'histoire, désigné par une folie destructrice comme une cible à abattre. Est-ce l'héritage écrasant d'un mangaka de légende, la peur de trahir la confiance donnée par les héritiers de Tezuka ou simplement moi qui n'ai pas compris la démarche initiale de l'auteur mais force est de constater que Naoki Urasawa, depuis deux ou trois tomes, vire de bord et s'efforce de coller au plus près à l'esprit originel du manga, quitte à s'éloigner de la situation de départ qu'il avait installé. Cette impression ressentie atteint son paroxysme dans ce tome 8 et tout particulièrement dans le dénouement final qui tranche considérablement avec l'ambiance sombre, le contexte fortement inspiré d'épisodes historiques récents ou la véhémence naissante des milices anti-robots.

Mes billets sur les précédents tomes étant plus qu'élogieux, cette introduction presque critique peut surprendre, mais en fait, il ne s'agit que de constatations. Cette transformation progressive ne m'a pas réellement déçu, mais plutôt surpris, ce qui n'est pas le cas du retour d'Astro. Mis en "sommeil" lors de son précédent affrontement avec Pluto, l'enfant-robot revenait épisodiquement dans l'histoire, le temps de révélations passionnantes sur son créateur, le Docteur Tenma. Les derniers tomes ne laissant plus aucun doute sur le réveil prochain de notre héros, la renaissance d'Astro donne le rythme de ce huitième et dernier tome de la série. Tandis que l'affrontement final se prépare, les dernières zones d'ombre, notamment celles dont Tenma détenait la clef, disparaissent pour laisser apparaître l'intrigue dans toute sa complexité et dévoiler ses nombreuses ramifications. Rien ou presque n'est laissé au hasard, le rôle de l'ensemble des protagonistes dans les différentes strates de l'histoire nous apparaissent sous leur véritable jour et témoigne, si besoin était, des qualités narratives de Naoki Urasawa et de son co-auteur Takashi Nagasaki. Le sens de la phrase "500 Zeus par corps" qui ne cessait de hanter Gesicht, l'identité du véritable chef d'orchestre de cette folie meurtrière, les manipulations du Président des Etats-Unis de Tracia durant le 31e conflit en Asie Centrale, autant de questions laissées en suspens qui trouveront des réponses. Cerise sur le gâteau, un court épilogue mettant en scène Brau 1589 finira d'achever les protestations de ceux qui se demandaient déjà ce que devenait le KR ou l'identité de ce mystérieux ours en peluche (robotisé ?) qui agit dans l'ombre depuis le début de la série.

Si mon avis est quelque peu mitigé par ce changement d'orientation - même si je comprends parfaitement qu'il doit être relativement difficile d'évoluer créativement dans un univers qui ne nous appartient pas – "Pluto" n'en demeure pas moins une œuvre aboutie qui s'inscrit dans la lignée des travaux précédents de Naoki Urasawa. Le manga aborde des thèmes classiques en science-fiction robotique, mais avec une approche singulière à mi-chemin entre le polar futuriste et l'hommage appuyé (surtout en fin de course) à un grand nom du manga, père d'un enfant-robot qui continue de susciter l'imaginaire des lecteurs de manga, plus de soixante ans après sa première apparition.

 

EAN : 9782505011781

Éditeur : KANA 

Parution : 01/07/2011

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